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La curatelle doit protéger les droits des victimes, jamais les en priver

La Cour de cassation (12 juin 2025) rappelle qu’un handicap physique n’altère pas la volonté : la curatelle ne doit jamais priver les victimes de leurs droits.
Curatelle et droits des victimes handicapées – Cour de cassation 12 juin 2025

Curatelle renforcée et victime tétraplégique  : La protection juridique des personnes vulnérables est un sujet essentiel, notamment lorsqu’il s’agit de victimes de dommages corporels graves. Parmi les dispositifs du Code civil, la curatelle renforcée accompagne les personnes dont les facultés sont altérées, sans les dessaisir de leurs droits. Encore faut-il que la mesure reste proportionnée et n’entrave pas la liberté de ceux qu’elle est censée protéger.

Un récent arrêt de la Cour de cassation (12 juin 2025) rappelle avec force un principe fondamental : le handicap corporel, aussi lourd soit-il, ne se confond pas avec une altération des facultés mentales. Les victimes, même sévèrement atteintes dans leur mobilité ou leur autonomie, demeurent des sujets de plein droit dès lors qu’elles peuvent exprimer leur volonté, fût-ce au moyen d’un appareillage ou avec l’aide d’un tiers.

Une victime tétraplégique face aux limites de la curatelle

Une femme devenue tétraplégique à la suite d’un accident avait perdu l’usage de la parole et de l’écriture, la plongeant dans un isolement extrême. Placée sous curatelle renforcée, mesure logique au départ pour prévenir tout abus et tout risque de mise en danger, elle a fait preuve d’une détermination remarquable pour surmonter ses difficultés.

Grâce à un casque muni d’une tige métallique lui permettant d’appuyer sur les touches d’un ordinateur, elle a retrouvé un mode de communication efficace. Ce progrès technique lui a rendu la possibilité d’exprimer clairement ses choix, redonnant un sens concret à son autonomie. Convaincue de pouvoir gérer ses intérêts, elle a saisi la justice pour obtenir la levée de la curatelle.

Une interprétation restrictive censurée par la Cour de cassation

Le tribunal puis la cour d’appel ont rejeté sa demande. Selon eux, le besoin d’une aide extérieure pour fixer le casque, manipuler la tige métallique ou allumer l’ordinateur signifiait que le handicap « altérait l’expression de la volonté ». Une telle analyse assimilait la dépendance physique à une incapacité intellectuelle.

Saisie, la Cour de cassation a censuré cette position. Par son arrêt du 12 juin 2025, elle juge qu’« après avoir relevé que, dotée, fût-ce par un tiers, du matériel adéquat, Mme X pouvait exprimer sa volonté, la cour n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ». En d’autres termes, l’assistance nécessaire à la mise en place d’un dispositif technique ne retire rien à la capacité de discernement ni à la liberté de décision.

Ce rappel interdit de priver une personne de ses droits au seul motif qu’elle a besoin d’un soutien matériel ou humain pour communiquer. Il recentre la curatelle sur sa finalité : protéger sans déposséder.

Un message fort pour les victimes de dommages corporels

Cette décision constitue une excellente nouvelle pour toutes les victimes de traumatismes médullaires ou de handicaps sévères. Elle affirme clairement que la perte de mobilité n’entraîne pas automatiquement la perte de capacité juridique. Dès lors qu’une personne peut exprimer sa volonté – par la voix, l’écriture, un dispositif numérique, une commande oculaire ou tout autre appareillage – elle doit rester maître de ses choix.

Elle rappelle aussi que les mesures de protection – curatelle simple, curatelle renforcée, tutelle – ne sont pas définitives. Elles doivent évoluer avec l’état de santé, les capacités de compréhension et les outils disponibles. Lorsque l’expression de la volonté est rendue possible, même avec une assistance technique ou humaine, la mesure doit être allégée ou levée.

Le rôle déterminant de l’avocat en dommage corporel

Dans ces situations sensibles, l’accompagnement par un avocat spécialisé en dommage corporel est déterminant. Son rôle est de :

  • Évaluer la pertinence du maintien, de l’allégement ou de la levée d’une mesure de protection ;
  • Réunir les preuves de la capacité d’une victime à exprimer sa volonté par des moyens adaptés ;
  • Défendre devant le juge la reconnaissance pleine et entière des droits de son client.

Au Cabinet Jehanne Collard et Associés,  nous veillons à ce que la protection juridique demeure un outil au service de la dignité, et jamais une barrière injustifiée à la liberté.

En pratique : nos conseils

  1. Documenter précisément les moyens de communication employés (matériel, assistance, protocoles d’usage).
  2. Solliciter des évaluations fonctionnelles et médicales actualisées démontrant la compréhension et la constance de la volonté.
  3. Demander la révision de la mesure (allégement/levée) quand l’expression de la volonté est stabilisée.
  4. Se faire accompagner par un cabinet d’avocats en dommage corporel rompu à ces procédures.

Conclusion

L’arrêt du 12 juin 2025 consacre un principe essentiel : un handicap physique, même lourd, ne justifie pas de restreindre la capacité juridique d’une personne dès lors que sa volonté peut être exprimée par des moyens adaptés. Cet enseignement doit guider familles, soignants, tuteurs et magistrats dans toute mise sous protection. Les victimes doivent pouvoir rester maîtres de leur destin, accompagnées par un avocat qui défendra leur autonomie et leurs droits fondamentaux.

Crédit photo : F. Chiche/Sora.

Parler à un avocat en dommage corporel

En savoir plus : 

Tétraplégie, paraplégie, quelles aides humaines ?

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